

Daphné Bédinadé, doctorante Centre Européen de Sociologie et de Science Politique Structure de recherche associée à la MRSH : CERREV Date : 14/05/2019 Lieu : MRSH Caen Durée : 1:01:40 | ![]() |
Cette communication a été enregistrée lors d'une séance du séminaire Dominations, Inégalités, Vulnérabilités (DIV) du Centre de Recherche Risques et Vulnérabités (CERREV), consacrée aux intersectionnalités.
Daphné Bédinadé est doctorante au Centre Européen de Sociologie et de Science Politique (CESSP/ EHESS). Formée en anthropologie sociale, elle s’emploie à utiliser les méthodes et outils des sciences sociales afin de saisir les problématiques culturelles des entreprises et contribuer à la production d’enquêtes et études.
Résumé de la communication
La communication entend présenter l’enquête en cours sur le marché et l’industrie de la beauté et des cosmétiques dits ethniques en France et au Brésil. On observe depuis quelques années l’émergence d’un segment « ethnique » de la beauté et des cosmétiques, qui se traduit par une offre croissante de produits et services spécifiquement adressés aux populations noires et dites métissées en France et au Brésil, longtemps invisibilisées dans ces espaces. En effet, ce marché, longtemps considéré comme de niche, a pris beaucoup d’ampleur et gagné en visibilité depuis les années 2010 et notamment via les réseaux sociaux et l’émergence d’un « mouvement naturel » porté par les consommatrices au travers de forums, blogs, chaînes YouTube, entre autres. L’étude vise à saisir les conditions sociales d’émergence de ce marché et se centre sur trois catégories d’acteurs : les entrepreneur.e.s noir.e.s qui proposent des produits et services de beauté destinés aux populations noires et métissées ; les consommateur.ice.s particulier.e.s que représentent les « bloggeuses » ou « influenceuses » ; l’industrie cosmétique, principalement par les responsables de développement de produits (chimistes, chargés de recherche et développement et responsables marketing).
Le positionnement des entrepreneur.e.s et consommateur.ice.s noir.e.s est conséquence de l’invisibilité dont ces dernier.e.s sont sujet.t.es : absence de produits cosmétiques adaptés, invisibilité médiatique, absence de spécialistes du « cheveu afro » ou de la peau noire. Ce positionnement oscille entre une volonté de résistance, de se bâtir un espace économique propre hors du marché de la beauté et le désir d’exister au sein de cet espace. D’autre part, on souhaite interroger, du côté de l’industrie, les conditions de production de la beauté « ethnique », de quelle manière l’élément culturel rattaché à l’identité Noire est mis en jeu pour être intégré dans une sphère capitaliste de marchandisation, et enfin, si, au-delà du discours, celle-ci a véritablement élargi les normes corporelles qu’elle promeut et impose. Il s’agit, au travers de l’étude du segment de la beauté dite ethnique, de mieux saisir les diverses structures de relations de pouvoir, de genre, de race, de classe et d’inégalités à l’œuvre.
Daphné Bédinadé